MUSÉE MAURICE DENIS

Le musée Maurice Denis est niché dans une belle bâtisse entourée d’un beau parc dans la non moins belle ville de Saint-Germain-en-Laye. La quiétude et la sérénité qui se dégagent de l’endroit sont le parfait écho de l’oeuvre de cet artiste finalement peu connu, cet homme de famille très chrétien et très croyant dont les toiles diffusent des couleurs à la fois douces et lumineuses.

Maurice Denis et les Nabis sont des acteurs majeurs et pourtant méconnus de la naissance de l’art moderne. Ces artistes se regroupent à l’époque où les impressionnistes révolutionnent les codes traditionnels de la peinture. De l’impressionnisme, les Nabis gardent la couleur et la vivacité de touche mais ils en rejettent le manque d’idéal d’une peinture qui se cantonne à la représentation du réel. En 1888, un groupe de jeunes peintres de l’académie Julian se réunit autour de Paul Sérusier et s’auto-proclame “nabi” (“prophète” en hébreu). Ces jeunes peintres s’engagent à créer un art symboliste et synthétiste. Les lignes épurées, l’expression des sentiments et des émotions subjectives caractérisent le mouvement Nabi.

Maurice Denis devient à 20 ans le porte-parole des Nabis. Il est surtout connu pour être un théoricien de l’art et sera un enseignant passionné qui formera toute une génération d’artistes, dans l’enceinte même de cette majestueuse bâtisse, baptisée “Prieuré” par l’artiste lui-même.

Le bâtiment est construit à la fin du XVII° siècle selon la volonté de Madame de Montespan – favorite royale – pour accueillir les indigents de la ville royale de Saint-Germain-en-Laye. Il est ensuite transformé par Louis XIV en hôpital général royal. La chapelle aurait dû être au centre de l’édifice, flanquée de deux ailes, mais seule l’aile Sud qui abrite aujourd’hui le musée fut finalement construite.

Bien que né à Granville en 1870, Maurice Denis a toujours vécu à Saint-Germain-en-Laye. Il connaît la bâtisse depuis toujours, lorsque celle-ci était encore occupée par les Jésuites puis par la communauté paroissiale. Il forme rapidement le voeu d’acquérir ce vieil hôpital général royal qu’il baptise “le Prieuré”. Il commence par y louer une salle en guise d’atelier puis acquiert la bâtisse en 1914. Il y vivra jusqu’à son décès en 1943.

La Vierge à l’Enfant – Antoine Bourdelle – La femme et l’enfant de l’artiste ont servi de modèles pour réaliser les figures de cette statue et il faut bien avouer que la femme, l’enfant, la mère sont des thèmes très présents dans l’oeuvre de Maurice Denis. Cette oeuvre est commandée par un industriel alsacien qui souhaite rendre grâce à Dieu car son village a été épargné pendant la Première Guerre Mondiale

La Douleur – Aristide Maillol – Maurice Denis et Aristide Maillol sont très liés. Maillol s’est intallé non loin, à Marly-le-Roi en 1903, facilitant les échanges artistiques entre les deux hommes

Maurice Denis apprécie énormément son jardin, auquel il consacre beaucoup de temps. Les cyprès qui bordent la terrasse évoquent son séjour en Italie. Le dénivelé permet l’aménagement de terrasses et un pigeonnier, un poulailler et quelques cages à lapins agrémentent le parc.

Le Centaure Mourant – Antoine Bourdelle – Bourdelle est fasciné par la mythologie et les symboles, notamment par la créature du centaure. Mi-homme, mi-animal, il représente la nature humaine dans toute sa complexité. Ici, il se tient debout, la tête inclinée, mourant. Bourdelle et Denis se connaissent et participent ensemble au décor du Théâtre des Champs-Elysées. Plusieurs sculptures déposées par le musée Bourdelle à Paris jalonnent le parc du Prieuré

Avant même d’acquérir le Prieuré, Maurice Denis y travaille. Il loue une salle de la bâtisse dès 1910. Chargé deux ans plus tard de la décoration de la coupole du Théâtre des Champs-Elysées, l’artiste a besoin de plus d’espace pour élaborer ses toiles. Il se fait construire un atelier dans le jardin, assez haut pour accueillir les toiles monumentales sur lesquelles il travaille, mais dont la forme singulière a été imaginée afin d’éviter de couper les arbres qui l’entourent. L’atelier, qui ne se visite pas, devrait bientôt faire l’objet de rénovations, afin d’être intégré dans le parcours de visite.

Notre grand-père, au sortir de l’atelier, se plaisait à jardiner, sécateur en main, et appréciait la présence de ses petits-enfants, nous détaillant les premiers bourgeons, la couleur des écorces, le développement des fleurs et des fruits, ou les nuages »

Claire Denis, petite-fille de l’artiste

La chapelle vue de l’extérieur

L’Epopée polonaise – Antoine Bourdelle – Il s’agit d’un fragment du Monument à Adam Mickiewicz, poète et patriote polonais. Cette oeuvre marque un moment fort dans la reconnaissance du sculpteur qui se voit honoré d’une commande publique

Les Fiancées – Maurice Denis

L’Éternel Printemps – Reconstitution de la salle à manger de Gabriel Thomas à Meudon

L’Eternel Printemps – Reconstitution de la salle à manger de Gabriel Thomas à Meudon

Les Nabis vouent une passion pour le décor car c’est pour eux une façon d’intégrer l’art à la vie quotidienne. Dans la mouvance de l’Art Nouveau, ils veulent faire de l’art partout et en tout, ce qui explique la multiplicité des supports artistiques choisis (peinture, vitrail, sculpture, etc). Ce décor de L’Éternel Printemps est commandé à Maurice Denis par Gabriel Thomas, son principal mécène. Dans une harmonie de roses et de blancs, le profane et le sacré se mêlent dans une nature printanière idéalisée qui se transforme en Jardin d’Eden. La jeune fille devient femme puis s’épanouit dans la maternité, selon le canon de la Madone.

Bas-relief en plâtre exécuté par Joaquim Claret sur un dessin de Maurice Denis

Historien de l’art, conservateur du musée du Louvre, Paul Jamot (1863-1939) fait appel à l’architecte Auguste Perret et à Maurice Denis pour concevoir un monument à la mémoire de sa femme Madeleine, morte prématurément en 1913. Les trois hommes ont notamment été en relation lors de l’édification du Théâtre des Champs-Elysées et Jamot, qui a pu admirer à cette occasion les talents de sculpteur de Denis, se tourne spontanément vers lui. Retardé par la guerre, le projet est repris en 1919 et le monument installé en 1921 au cimetière du Montparnasse à Paris. Les mains de l’ange et de la morte sont au cœur de la composition imaginée par Denis, qui dans un même mouvement évoque, selon le souhait de Jamot, l’amour, la maladie, la mort et la résurrection.

Saintes Femmes au tombeau – Maurice Denis

Portrait d’Yvonne Lerolle – Maurice Denis

Jésus chez Marthe et Marie sur le balcon de Silencio – Maurice Denis

Maurice Denis est un catholique fervent, ce qui explique que la foi soit au centre de son oeuvre où se mêlent souvent sacré et profane. Après la Grande Guerre, il fonde les Ateliers d’Art Sacré, destinés à former une nouvelle génération d’artistes chrétiens.

L’Échelle dans le feuillage – Maurice Denis

Les Pèlerins d’Emmaüs au Prieuré – Maurice Denis

La chapelle Saint-Louis de l’hôpital général royal a été inaugurée en 1718. Elle est en piteux état au sortir de la Révolution. Les Jésuites installent à la fin du XIXème siècle leur espace cultuel dans une pièce adjacente, avec un accès par le jardin. Après l’expulsion de la communauté religieuse en 1905, la paroisse conserve cet aménagement pour les messes qui y sont encore célébrées périodiquement.

Maurice Denis rêve de rénover la chapelle, bien avant son acquisition du Prieuré en 1914. Il passe plus de quinze ans à la rénover, et c’est là une formidable opportunité pour ce peintre profondément croyant de réaliser un ambitieux décor religieux sans les contraintes de la commande imposées par un ordre religieux. La foi en la résurrection est le thème central du décor.

La chapelle devient également un lieu de formation pour une nouvelle génération d’artistes chrétiens.

Le décor comporte de nombreux hommages à la première épouse de Maurice Denis, Marthe, décédée en 1919. Le chemin de croix qui orne les murs de la chapelle a été peint pendant la très longue maladie qui emportera l’épouse du peintre.

La chapelle est rendue au culte en 1922.

Musée Maurice Denis

Le 10 Novembre 2023