MUSÉE MATISSE – NICE

Le musée Matisse de Nice, dédié comme son nom l’indique au peintre français Henri Matisse, regroupe l’une des plus importantes collections mondiales de son œuvre.

Installé dans la Villa des Arènes, une villa génoise du 17ème siècle située sur le très chic Mont Cimiez à Nice, le musée ouvre ses portes en 1963. La villa en tant que telle, dont la construction débute en 1670 pour s’achever en 1685, se nomme à l’époque Palais Gubernatis – du nom de son propriétaire. Elle ne prend le nom de Villa des Arènes qu’en 1950 lorsque la ville de Nice s’en porte acquéreur.

Les collections permanentes du musée Matisse ont été enrichies au fil des ans grâce à de nombreuses donations – en premier lieu celle de Matisse lui-même, puis celles de ses héritiers – et grâce à divers dépôts de L’État français. Le musée regroupe ainsi aujourd’hui 68 peintures et gouaches, 236 dessins, 218 gravures, 57 sculptures, sans parler des livres illustrés, des photographies et des effets personnels du peintre.

Venons-en audit peintre. Henri Matisse naît en 1869 dans le Nord de la France d’un père marchand de grains et d’une mère peintre amateur. Destiné à reprendre l’affaire paternelle, sa santé fragile lui interdit de porter de lourdes charges. Il s’oriente alors vers le droit et commence sa vie professionnelle comme clerc de notaire. Mais à 20 ans, cloué au lit pendant de longues semaines par une crise d’appendicite, il découvre le plaisir de peindre grâce à une boite de peinture offerte par sa mère. C’est la révélation.

Il abandonne le droit et part à Paris. Il suit les cours de l’Académie Julian et s’inscrit à l’Ecole des Beaux-Arts à l’atelier de Gustave Moreau, qui encourage ses élèves à rêver leur peinture au-delà de la maîtrise technique. Pour gagner sa vie, il devient peintre décorateur à la journée pour les décorateurs de théâtre. Il réalisera d’ailleurs des années plus tard – en 1920 – les décors et les costumes du ballet de Diaghilev « Le Chant du Rossignol » sur une musique de Stravinsky.

Il persiste. Gustave Moreau, qui étudie ses premières œuvres prophétise que Matisse va « simplifier la peinture ».

Il se marie en 1898 avec Amélie qui ouvre un magasin de mode afin de faire vivre le couple et leurs trois enfants, Marguerite (née d’une première union de Matisse), Jean et Pierre.

La Cour du Moulin à Ajaccio – 1898

Les Gourgues – 1898

De Corse, Matisse avait envoyé à son ami de l’atelier de Gustave Moreau, Henri Evenepoel quelques uns de ses tableaux encore frais. Celui-ci ne peut réprimer sa surprise : « Je trouve que c’est de la peinture exaspérée, oui ! Au premier abord, elles m’ont tué ! Je me suis senti très bourgeois en les regardant ! ».

En 1904, il passe l’été à Saint-Tropez avec le peintre Signac dont il adopte la technique pointilliste. Les couleurs fortes du Sud de la France sont un véritable choc pour lui : il a encore plus envie de les utiliser et de les faire éclater sur ses toiles.

Figure à l’ombrelle – 1905

Au Salon d’Automne de 1905, ses toiles aux couleurs violentes posées en aplat et sans ombres font scandale, et le critique d’art Louis Vauxcelles compare la salle exposant les œuvres de Matisse, de Vlaminck et Derain à « une cage aux fauves ».

Le terme est tout de suite adopté et adapté et Matisse devient le chef de fil du mouvement fauviste dont les couleurs éclatantes bousculent les esprits conformistes. En abandonnant la notion de perspective en utilisant de grands aplats de couleurs (technique qui sera encore un peu plus poussée avec les gouaches découpées), Matisse définit un peu plus son style.

Sa renommée grandit et l’on peut lire sur les murs de Montparnasse : « Matisse rend fou, Matisse est plus dangereux que l’absinthe ». Il signe en 1909 un contrat avec la galerie parisienne d’avant-garde Bernheim-Jeune et s’essaye également à la sculpture.

Bronze Henriette III – 1929

Grand voyageur, que ce soit en France ou à l’étranger, Matisse retranscrit ses impressions sur ses toiles. Les odalisques ont par exemple occupé une bonne partie de sa vie. L’« Odalisque au coffret rouge » fait partie d’une série de tableaux réalisés à Nice dans les années 1920. Cette série témoigne de l’influence que les voyages en Algérie (1906) et au Maroc (1912, 1913) ont pu avoir sur Matisse. Installé dans un appartement donnant sur le Cour Saleya de Nice, cette huile sur toile intimiste dénote une mise en scène fabriquée et un peu artificielle que la peau claire du modèle (Henriette Darricarrère) vient encore souligner.

L’Odalisque au coffret rouge – 1927

Tempête à Nice – 1920

La leçon de piano – 1923 – Matisse sature l’espace pictural de cette huile sur toile et la juxtaposition de plans ne laisse pourtant aucun doute sur leur organisation spatiale. Au lieu de présenter une profondeur fictive, le tableau s’affirme dans sa planéité et cette conception du tableau est l’un des apports essentiels de Matisse à l’art pictural du 20ème siècle.

Nymphes dans la forêt – 1935-1942/1943

Matisse se sépare de sa femme Amélie en 1939. Il vit dans le Sud de la France avec Lydia Délectorskaya, son assistante puis modèle et maîtresse. En 1941, atteint d’un cancer, il subit une opération chirurgicale qui le laisse très diminué. Il dessine donc au crayon et au fusain et commence à travailler avec ses gouaches découpées : il peint des morceaux de papier qu’il découpe et fait apposer sur la toile.

Le repos de la danseuse – 1942 – Matisse entreprend entre août et septembre 1942 une série de sept peintures dans lesquelles il fait poser un modèle costumé en danseuse. L’été 1942 a été difficile pour Matisse qui souffre des suites de son intervention chirurgicale. Matisse s’intéresse ici à la qualité spatiale de la couleur.

Dans le difficile contexte de la Seconde Guerre Mondiale, Matisse ne réalise que quelques toiles en 1944 dans son atelier de Vence où il s’est installé depuis juillet 1943.

Femme au chapeau bleu – 1944 – Pour cette toile, Matisse fait poser une jeune femme récemment rencontrée à Vence, Ginette Michel, dans une très belle robe blanche dont il accentue le luxe en l’associant à la fourrure d’une pelisse. C’est la blancheur de la robe ainsi que son mouvement fluide qui mobilisent alors l’attention du peintre, le visage renfrogné étant par ailleurs très peu courant dans l’œuvre du peintre qui ne décrit généralement pas les états d’âme du sujet peint.

Sa femme Amélie, ses enfants Marguerite et Jean font partie de réseaux de Résistance. Si Amélie est arrêtée et relâchée au bout de 6 mois, Marguerite est moins chanceuse. Torturée par la Gestapo et défigurée, elle ne revoit son père qu’en 1945. Très ému, Matisse exécute de nombreux portraits de Marguerite, dont le dernier montrera un visage enfin apaisé.

Intérieur à la fougère noire – 1948 – Cette huile sur toile appartient à l’ultime grand ensemble de peintures réalisé par Matisse à Vence entre 1946 et 1948. La composition sans profondeur s’articule autour d’éléments simplifiés et des couleurs éclatantes. Le savant arrangement des surfaces annule la limite du cadre du tableau.

Les dix dernières années de sa vie seront principalement dédiées aux papiers découpés, technique qui ménage sa santé.

Il meurt en 1954 à Nice, laissant une œuvre bien particulière. Son influence sur la peinture américaine et l’École de New-York est immense, comme elle l’est sur le pop art.

Matisse restera dans les esprits comme le libérateur du trait et de la couleur.

Musée Matisse

Le 7 juillet 2023